La culpabilité issue de l'expression de ses droits fondamentaux par Alain Tortosa. - Alain Tortosa

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La culpabilité issue de l'expression de ses droits fondamentaux par Alain Tortosa.

Textes

Cette émotion est une des émotions les plus difficiles à appréhender et notamment chez les personnes ayant un trouble de la personnalité borderline.
La culpabilité est une des unités de mesure qui va faire de soi une bonne ou une mauvaise personne et par extension une personne aimable ou pas à ses yeux et aux yeux d'autrui.

Et c'est autrui qui va être au centre de cet écrit...

Je vais ici illustrer les limites de la maxime « ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'il te fasse ».

Imaginons que j'aille voir un film polonais sous-titré en croate dans un cinéma d'art et d'essai.
L'ambiance à l'intérieur de la salle sera plus proche d'un monastère que d'un terrain de football.

A la fin du film, je me lève pendant le générique, ne pensant pas mal faire, et mon voisin de derrière m'invective en me signifiant que je l’mpêche de jouir du générique.

Si je me place de son point de vue, je l'agresse car je le gêne ce qui est vrai.
Toujours de son point de vue, je suis coupable de le priver de ce bonheur évident...
De fait je fais une mauvaise action qui va me rendre coupable vis à vis de lui et ceci peut rejaillir sur l'amour propre que je me porte.
Écouter cette émotion m’bligerait à m'excuser, me rasseoir et attendre la fin du générique avant de me lever à nouveau.

Oui mais...

Et moi dans tout ça ?
Ai-je le désir de voir ce générique ? Non
Ai-je le droit de ne pas vouloir voir ce générique ? Bien sûr que oui.
Ai-ce mal ? Et pourquoi le serait-ce ?

Et autrui ?
A-t-il le droit de m'obliger à regarder un générique que je ne veux pas voir ?
Non et nous sommes donc dans une situation de droit fondamental contre droit fondamental.

J'ai le droit légitime de ne pas voir ce générique et le spectateur derrière moi a le droit légitime de le  regarder.
Celui qui exerce son droit fondamental sera à la fois coupable de priver l'autre de son droit fondamental et en plus le rendra coupable de vouloir nuire au droit du premier.

J'exerce mon droit en quittant la salle avant la fin du générique, je suis coupable de gêner le spectateur derrière moi et s'il veut m'en empêcher je le rends coupable de vouloir me priver de mon libre arbitre.
J'exerce mon droit de regarder le générique, je suis coupable d'obliger la personne devant moi à le regarder aussi et si elle veut se lever, je la rends coupable de vouloir me priver de mon libre arbitre.

Nous sommes ainsi dans un exemple « droit fondamental » contre « droit fondamental ».

Cette situation peut se révéler très perturbante pour une personne qui souffre d'un trouble borderline et dont l'objectif est de ne pas se sentir coupable.
- Si elle se lève et part, elle va ressentir la culpabilité que lui a envoyé autrui dérangé par son départ.
- Si elle renonce à partir, elle va ressentir de la culpabilité d'avoir accepté le dictât d'autrui.
Elle se retrouve de fait dans une impasse émotionnelle.
Exercer son droit et nuire ou renoncer à son droit et considérer que le désir de l'autre a plus de valeur que son propre désir.

Bien entendu nous sommes dans des cas de figure où les droits de chacun sont à des degrés comparables et où les nuisances sont comparables.
Cela ne fonctionne pas dans les situations extrêmes.
D'une certaine manière le psychopathe a le droit fondamental de tuer sa victime, expression de son désir et sa victime désignée a le droit de vivre, expression de son désir.
Nous pouvons raisonnablement penser que le psychopathe nuit plus à sa victime en la tuant que la victime ne nuit au psychopathe en refusant d’être tuée même si c'est très perturbant pour lui.
De l'importance de culpabilités comparables pour l'exercice de son droit fondamental à être coupable.

Tout ceci pour dire qu'il existe de très nombreux cas où il est impossible d'échapper à la culpabilité de nuire à autrui sans se nuire à soi-même et de fait devenir coupable de nuire à ses droits fondamentaux.

Paradoxalement il existe donc des culpabilités qui sont un indicateur du droit à exister et que leur absence peut être un signe d'alerte.

Ainsi une personne borderline qui arriverait parfaitement à être sans culpabilités renvoyées par autrui ou ses parents (que ce soit dit ou non), qui de fait arriverait à être parfaitement à l'image que l'on attend d'elle serait de fait en danger réel de non-être.

Dans ce cas de figure, cela signifie qu'il n'est pas possible de sortir d'un trouble de la personnalité borderline sans devenir coupable aux yeux de personnes dont on recherche l'amour (parents, conjoint,...).

Vouloir échapper totalement à la culpabilité revient de fait à devoir échapper à soi-même.

D’où l'importance vitale des culpabilités issues de ses droits fondamentaux et de la nécessité de pouvoir vivre tout en étant raisonnablement « coupable ».

« Je suis coupable (mais pas trop) donc je suis... » (1)

Dans certains cas j'exercerai mon droit et dans d'autres cas j'y renoncerai mais je demeurerai conscient qu'il s'agissait quand même de mes droits fondamentaux.
Le régulateur naturel sera le niveau de mon curseur de culpabilité envers moi-même et envers autrui.

La maxime du début devrait plus être « ne fais pas à autrui et à toi-même ce que tu ne voudrais pas qu'il te fasse ».

Merci
Alain Tortosa.
Décembre 2018.
Auteur de « le trouble de la personnalité borderline, victime de ses émotions » et « dans l’émotion d'une borderline ».


(1) A noter que le danger d’écraser autrui en étant narcissique ou psychopathe est nul car celui-ci ne ressent pas ou peu la culpabilité. Dans notre cas de figure c'est la conscience de mal agir, d'avoir nuit à autrui et la culpabilité réelle ressentie qui est l'unité de mesure de l'exercice de ses droits fondamentaux.

Thérapie et trouble borderline par Alain Tortosa


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